dimanche 18 septembre 2011

Le parrain IV ... dans une école près de chez vous


Ce vendredi-ci a été assez exceptionnel à l'école. Je veux dire, tous les vendredis sont exceptionnels, dans une école. Il y a une certaine fébrilité dans l'air, une excitation palpable et une énergie disons ... euphorique. Ce doit être l'appel du congé, que l'on entend au loin, qui nous fait dresser les poils. Ça, ou la perspective d'une délivrance prochaine, qui accroche un sourire niais à la face de pas mal tout le monde.



La semaine se termine et bien souvent, quoiqu'en début d'année ce soit moins intense, c'est aussi l’occasion de concours estudiantins d’à-qui-poussera-le-prof-à-boutte-le-premier... des heures de plaisir, je vous dis pas. L'extase pour tous les adeptes de sensations fortes. Je pense même que les fins de semaine sont à la semaine ce que les vacances d'été sont à l'année scolaire... un genre de time-out, de pause, de retraite obligée, d'exil en territoire neutre, question de recharger les batteries et de refaire le plein de santé mentale.  Et j'exagère à peine. Non en fait, je n'exagère pas du tout.



Mais ce vendredi-ci, ah! Ce vendredi-ci, n’avait rien à envier à Omerta, au Parrain ou aux Sopranos de ce monde. Ce vendredi-ci était canon. Canon de 12 pompeux. Comme dans « L’enseignante se fait gentiment accueillir par le SWAT (ben, pour dire vrai, le policier était juste habillé en noir) et son gros canon de 12 pompeux lors de son arrivée sur le terrain de l’école transformé pour l’occasion en centre de détention ». Je veux ben croire que j’enseigne dans un milieu hot (dans le sens de « qui me donne parfois des sueurs ») mais de là à ce qu’un (assez sexy je dois l’avouer) membre de l’escouade de ceussent qui courent après les méchants m’accueille armé jusqu’aux dents (son gun, tenu dans le creux de sa main, bras déployé le long du corps, y allait jusqu’aux dents) il y a une marge. Un fossé. Un gouffre. Que dis-je, un canyon.



C’est donc un peu craintive qu’après avoir immobilisé mon véhicule à quelques mètres de ce représentant de l’ordre (mon truck c’est de la bouette, mais pas au point de risquer de le voir criblé de balles) je me suis avancée tout doucement, mon sourire niais du vendredi au visage, pour lui demander que diantre pouvait-il se passer pour que j’aie droit à la haie d’honneur des combattants du crime. C’est alors qu’il m’expliqua, comme une serveuse décline machinalement la carte des desserts, qu’un individu dangereusement armé rôdait dans les parages et que je devais entrer dans l’école et n’en ressortir sous aucun prétexte. Rien que ça.



Je vous mentirais si je vous disais que jamais, au grand jamais, il ne m’est passé par la tête de retourner de bord et de prétexter un risque quelconque pour mon intégrité physique en « callant malade » mais je me suis mise à penser à tous les « front page » que je n’aurais aucune chance de faire si l’occasion de sauver l’école des griffes d’un maniaque dangereux, sanguinaire et cruel se présentait.  J’suis de même moi, toujours prête à me dévouer pour faire la une du Journal de Mourial.



Je me suis donc dépêchée d’entrer à l’intérieur, tout en observant d’un œil étonné les pompiers faisant leur jogging quotidien, autour de l’école. « Le cours doit être contingenté, ils doivent pouvoir se permettre quelques pertes, c’est comme rien »  que je me suis dit, en haussant les épaules. Une fois à l’intérieur, mis à part quelques secrétaires surexcitées par cette overdose d’adrénaline, c’était le calme plat. J’ai oublié de vous dire que je n’avais pas la première période ce matin-là et que les élèves étaient en classe lorsque l’opération policière a débuté. Léger détail. Donc mis à part l’hélicoptère atterrissant dans le terrain de soccer et les policiers patrouillant autour de l’école, cerises allumées, les doux chérubins n’ont rien vu de tout ça. Mouin. Je me suis donc dirigée rapidement vers la salle des profs et j’ai pu y apprendre que les agents de la paix recherchaient des hommes armés s’étant sauvés à bord de leur BMW noire. Ils auraient laissé la BMW non loin pour aller se cacher dans le boisé derrière l’école. Le même où les sentiers sont identifiés par une myriade de petits sachets carrés. Sachets de pot, de pilules ou de condoms, c’est au choix.



Je suis donc allé offrir mes services à ma directrice adjointe (vous vous rappelez mon objectif premier de front page?) avant d’aller rejoindre les collègues qui comme moi n’avaient pas la première période. Nous en avons profité pour procrastiner un brin en tendant une oreille attentive, à l’allure désintéressée, aux walkies-talkies de la direction, source intarissable d’informations semi-secrètes, de potins et de sujets de conversion sur l’heure du dîner. Finalement, les donneux de tickets n’ont pas réussi à appréhender les suspects (Claude Poirier sors de ce corps) à temps pour la fin de la première période, alors il a fallu garder les jeunes dans les locaux de classe.  Pas super longtemps, mais 40 minutes d’occupationnel avec une gang d’adolescents survoltés (je vous rappelle que nous sommes un vendredi) c’est du sport. Digne des meilleurs athlètes, pis encore. Des meilleurs athlètes, sur l’EPO enrichie de créatine. Pas facile. Pis là je parle pour mes collègues parce que moi je me la coulais douce, peinarde, dans le pavillon. Mais bon, je peux facilement imaginer.



Ceci dit, ce n’est que vers 11h45 que le directeur a reçu la permission de relâcher les fauves puisqu’après quelques échanges de coups de feu (Laval c’est bon pour le moral!) les policiers avaient arrêté les suspects, de race anonyme. (Celle-là, de race anonyme, je l’ai volée à Claude 10-4 Poirier. Rendons à César ce qui appartient à Claude. Je l’ai trouvé sur sa page Wikipedia. Il y en a plein d’autres tout aussi juteuses, vous irez voir!).



Ce n’est qu’une fois revenue dans mon antre que j’ai appris qu’il s’agissait d’une histoire impliquant le chummy à Rizzuto, Raynald Desjardins. Une banale histoire de mafia italienne, une guerre entre Sicilien et Calabrese, la routine habituelle quoi.  



Faut croire que l’enseignement ce n’est pas suffisamment excitant, parfois faut y ajouter une p’tite dose de piquant!



Sur ce, je retourne à mon exil ressourçant. Bon dimanche!

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